Attaquons
nous aujourd'hui à un problème à la fois scientifique et
philosophique qui nous met devant l'immensité de ce qui nous
entoure.
Une
question légitime, même si elle ne semble pas avoir d'impact sur
notre vie de tous les jours. Quoique... Il existe de façon
quasi-atavique chez l'homme un esprit de pionnier. Depuis l'aube des
temps, l’humanité a toujours cherché à dépasser chaque nouvelle
frontière (merci star trek), chaque nouvelle montagne, fleuve ou
océan. Sauf que nous sommes aujourd'hui dans une impasse et à moins
d’injecter des moyens énormes pour dépasser les 11,2 km/s qui
nous lient à la Terre (vitesse de libération de la Terre, les
physiciens comprendront), nous sommes actuellement coincés dans le
puits gravifique terrestre.
Ce
n'est pas en soi une mauvaise chose, mais l'enfermement nous pousse
(en tant qu'espèce et qu'individu) à nous tourner vers l'intérieur
pour chercher des réponses, ce qui est beaucoup plus difficile que
de franchir la rivière suivante.
Bref,
tout ça pour dire que notre nouvel terre promise se trouve dans le
ciel et que pour l'instant nous devons nous contenter de la regarder
de loin et d'étudier sa géographie. Donc infini ou pas ?
Pour
commencer, il faut s'intéresser à la signification du mot infini,
de ce qu'il implique et s'intéresser un peu à la topologie
des différentes possibilités d'espace qui collent avec nos
observation du ciel. Ouh le vilain mot ! L'une des plus
horribles branches des mathématiques !
La
topologie, c'est très moche. Cela consiste à regarder quel forme
peut prendre un espace multidimensionnel. Une exemple simple qui
explicite un peu la discipline pour commencer : on peut se
demander quelle forme peut prendre un plan, selon si on veut qu'il
soit ouvert (pas de frontières) ou fermé. Un rectangle est un
espace plan fermé et fini par exemple. Mais on peut aussi courber le
plan, pour obtenir un tore par exemple, qui est un espace plan ouvert
et fini (tout comme la sphère) : on peut continuer à marcher
indéfiniment sur sa surface sans jamais rencontrer de "frontières".
Obtention d'un tore à partir d'un rectangle
Maintenant
voyons de la topologie 3D pour les possibles formes de l'univers :
- Un univers infini au sens commun du mot signifierai un espace infini dans toutes les directions : pas de bords, on peut continuer à marcher dans n'importe quel sens et toujours trouver quelque chose. Cette topologie correspond assez bien avec ce que nous observons de l'univers aujourd'hui. Quelques remarques sur cette possibilité : un univers infini signifie que toutes les possibilités (en accord avec les lois physiques qui le régissent) se réalisent quelque part. Donc si c'est le cas, une planète très similaire à la notre existe où quelqu'un de très similaire à vous, cher lecteur, lit un article sur l'infinité de l'univers et au lieu de le trouver pénible, le trouve absolument passionnant ! (c'est ce que je me dis pour me motiver pour écrire). Flippant non ? En conclusion, possibilité physiquement envisageable mais étrange sur le plan philosophique.
- Il existe cependant d'autres topologies qui pourraient marcher, et qui décrirait cette fois-ci un univers "fini". Il suffit de reprendre l'exemple du tore et de l'extrapoler depuis une géométrie plane, à une géométrie 3D. Malheureusement, il est impossible de représenter une telle forme géométrique puisque nous manquons d'une dimension supplémentaire pour pouvoir le dessiner (le tore est un plan mais il faut le représenter en volume pour comprendre son fonctionnement). Là aussi, une telle topologie pourrait coller à l'univers observable en considérant par exemple que la lumière provenant d'une même galaxie peut prendre différents trajets autour du tore et nous donner l'impression d'observer plusieurs galaxies différentes alors qu'il s'agit de la même à divers âges.Certains cosmologues imaginent plutôt un univers "chiffonné", c'est à dire composé de sections planes d'espaces séparées par des régions où les règles de la physique seraient étrangement différentes.
Un
argument existait autrefois pour prouver que l'univers n'était pas
infini, avec que les premières mesures de la vitesse de la lumière
viennent tout remettre en cause. Il disait à peu près ceci :
si l'univers est infini, alors où que l'on regarde dans le ciel, il
devrait toujours y avoir une étoile à plus ou moins grande distance
qui nous envoie sa lumière. Donc le ciel nocturne devrait être
entièrement blanc. Il ne l'ai pas, cqfd.
Sauf
que la lumière ne voyage pas à une vitesse infini et qu'il peut
exister des étoiles dont la lumière ne nous est pas encore arrivée.
Argument donc désormais reconnu comme faux mais qui illustre l'un
des plus grands problèmes de l'observation astronomique moderne :
la limite que représente la vitesse de la lumière. Il nous est
physiquement impossible de "voir" plus loin que 13,7
milliards d'années lumières et donc de trancher facilement entre
les différentes hypothèses de topologie.
Il
existe cependant plusieurs expériences en cours qui pourraient
répondre à cette question.
La
première s'intéresse à la courbure spatiale de l'univers et
permettrait donc de trancher entre un univers plat et infini ou un
univers courbe et fini. Grâce aux mesures du satellite Planck, on
sait aujourd'hui que cette courbure est très petite. Donc l'univers
est soit très vaste et peu courbé, soit infini.
La
seconde consiste à compiler toutes les galaxies visibles et tenter
de repérer si certaines se ressemblent un peu trop. Cela prouverait
que l'univers est courbé car nous observerions
des objets de plusieurs point de vu différents. Mais avec la
foultitude de galaxies existantes (170 milliards aux dernières
nouvelles), la tache s'annonce longue.
Donc
pour l'instant pas de réponse définitive à cette question
essentielle de l'infinité de l'univers. Si
par malheur l'astronomie vous intéresse, je
vous invite à
aller regarder le
cours d'introduction
à l'astronomie
de l'université de Curtin qui est très instructif et facile
d'accès.